Pratiquées depuis l’Antiquité populaire au Moyen Âge, et formalisées au 19e siècle sous le nom d’assolement triennal, les rotations sont une technique de première importance au potager. Elles consistent à se faire succéder dans le temps différents légumes, fines herbes et fleurs, comestibles ou pas, sur une même parcelle de terrain.
Mettre en place un système de rotations au potager est non seulement utile, mais c’est indispensable. Cette technique présente plusieurs avantages. En plus de prévenir l’épuisement du sol par des prélèvements importants des mêmes types d’éléments nutritifs, on évite de « l’abîmer » en sollicitant les mêmes couches. En effet, des plantes d’espèces différentes utiliseront divers nutriments et les racines exploreront le sol de manières particulières et sur des hauteurs variables. De plus, on empêche les parasites spécifiques à un légume, ou à une famille de légumes, de proliférer, car pour se développer, plusieurs parasites ont besoin de conditions particulières. Si celles-ci ne sont pas réunies, la présence de ces parasites diminue de manière importante. Les rotations sont aussi des entraves au développement des herbes indésirables, plusieurs d’entre elles étant spécifiques à un type de sol dans lequel poussent les plantes. Cela tient notamment à son niveau de richesse ou aux quantités d’eau retenue ou absorbée.
Il existe différentes bases possibles pour les rotations. Selon les appétits, on regroupe alors les espèces de plantes gourmandes, moyennement gourmandes et peu gourmandes. Selon les besoins en eau, on rassemble les espèces assoiffées, moyennement assoiffées et sobres. Une autre base de classification peut être faite selon les parties que l’on souhaite récolter, les feuilles, les fruits, les graines, etc., ou un système très approchant, selon la classe de légumes, légumes-fruits, légumes-racines, etc. On peut aussi les réunir ou les éloigner, par famille botanique et aussi mélanger la classe de légumes et les familles.
Parmi toutes ces approches, même si elle n’est pas parfaite, la meilleure méthode consiste à associer les plantes ayant les mêmes appétits et les mêmes besoins en eau. On distingue, par exemple, plantes gourmandes ou assoiffées des plantes moyennement gourmandes et assoiffés, et ainsi de suite. C’est le système de rotations le plus facile à mettre en place qui répond adéquatement au défi qu’est le maintien de la bonne succession d’année en année dans les parcelles d’un petit potager.
Doit-on inclure un engrais vert dans la rotation? Conseillé? Oui. Incontournable? Non. Un engrais vert est une culture qui n’est pas destinée à être récoltée, mais à être fauchée, puis laissée sur le sol, ou idéalement enfouie, pour qu’elle se décompose. L’objectif principal d’un engrais vert est d’enrichir le sol. Il le structure, l’aère et l’ameublit, il lui apporte de l’humus et il favorise l’activité biologique. De plus, un engrais vert étouffe les herbes indésirables et, selon le type de plantes employées, il «nettoie» le sol des micro-organismes néfastes aux cultures. Les engrais verts les plus couramment utilisés sont l’avoine, la luzerne, la phacélie, le sarrasin, le seigle et le trèfle. Le coût des semences est parfois élevé, et les engrais verts mobilisent le sol, qui ne peut être utilisé pour d’autres cultures. Il est donc conseillé d’évaluer les avantages et les inconvénients avant de décider d’en faire les semis.
Toutefois, on peut dire que les engrais verts sont mal adaptés aux petits jardins potagers. En effet, la plupart des jardiniers urbains ne souhaitent pas se « priver » de récoltes durant une année. Dans une rotation sur 4 ans, l’engrais vert occupe environ le quart de la surface. De plus les engrais sont difficiles à enfouir, surtout quand on n’a pas l’équipement motorisé nécessaire, comme un motoculteur.
Toutes les plantes n’exigent pas le même temps avant de pouvoir être installées à nouveau à la même place. Comme l’indique le tableau ci-dessous, la vaste majorité demande des rotations tous les 4 ans.
Nombre d’années avant le retour d’un légume sur une parcelle
- 2 ans: Courgette – Radis
- 3 ans: Navet – Panais – Radis blanc – Radis noir – Roquette – Rutabaga
- 4 ans: Aubergine – Bette à carde – Betterave – Céleri à côtes – Céleri-rave – Cerise de terre – Chicorée – Chou – Concombre – Cornichon – Courge – Épinard – Laitue – Maïs – Melon – Mesclun – Pastèque – Piment – Pois – Poivron – Pomme de terre – Tomate
- 5 ans: Ail – Carotte – Échalote – Fève – Gourgane – Haricot nain et grimpant – Poireau
- 6 ans: Oignon – Oignon vert
- 8 ans: Asperge – Rhubarbe
Même si, en théorie, une rotation sur 4 ans avec l’inclusion d’un engrais vert est idéale, dans les petits potagers, à cause de l’espace limité, on opte plûtot pour une rotation sur 3 ans. Si l’on a plus de six planches de dimensions à peu près égales, on peut arriver à ne pas mettre à un même endroit des plantes qui demandent six ans ou plus de rotations. Avec moins de 6 planches, c’est plus difficile.
Le plus souvent on recommande de combiner les rotations et les associations (voir: Le compagnonnage, au-delà de la controverse, des combinaisons productives), mais si c’est impossible et qu’il faut choisir, ce doit toujours être les rotations. On peut très bien cultiver un potager sans tenir compte des associations, mais ne pas implanter les rotations risque d’avoir des conséquences importantes après 3 à 4 ans de culture.
Comment procéder sur le terrain?
1) faire une liste des légumes, les fines herbes et les fleurs comestibles ayant les mêmes besoins en termes d’appétit et d’eau :
- Plantes gourmandes et assoiffées
- Plantes gourmandes et moyennement assoiffées
- Plantes gourmandes et sobres
- Plantes moyennement gourmandes et assoiffées
- Plantes moyennement gourmandes et moyennement assoiffées
- Plantes moyennement gourmandes et sobres
- Plantes peu gourmandes et assoiffées
- Plantes peu gourmandes et moyennement assoiffées
- Plantes peu gourmandes et sobres
- Voir la liste des plantes selon leur appétit à la page du balado : La fertilisation, et oui, c’est assez simple! et pour les besoins en eau L’arrosage, une histoire d’eau.
2) diviser le potager en 3 sections égales. Chaque zone recevra à tour de rôle un type de plantes.
3) subdiviser en module afin de regrouper les espèces par besoins en eau.
La succession est la suivante
- 1re année
- La section 1 reçoit les plantes gourmandes: on apporte du compost en grande quantité
- La section 2 reçoit les plantes ± gourmandes : on fait un apport de compost plus ou moins important
- La section 3 reçoit les plantes peu gourmandes : on n’apporte pas de compost
- 2e année
- La section 1 reçoit les plantes ± gourmandes : on fait un apport de compost plus ou moins important
- La section 2 reçoit les plantes peu gourmandes : on n’apporte pas de compost
- La section 3 reçoit les plantes gourmandes : on apporte du compost en grande quantité
- 3e année
- La section 1 reçoit les plantes peu gourmandes : on n’apporte pas de compost
- La section 2 reçoit les plantes gourmandes : on apporte du compost en grande quantité
- La section 3 reçoit les plantes ± gourmandes : on fait un apport de compost plus ou moins important
- 4e année
- On recommence le cycle
- La section 1 reçoit les plantes gourmandes: on apporte du compost en grande quantité
- La section 2 reçoit les plantes ± gourmandes : on fait un apport de compost plus ou moins important
- La section 3 reçoit les plantes peu gourmandes : on n’apporte pas de compost
Afin d’augmenter les rotations, dans la mesure du possible, dans une même section on déplace les types de plantes de module en module.
Pour plus de détails sur les rotations, consulter Potager productif, associer vos légumes facilement du même auteur chez le même éditeur.
Le tableau suivant représente les besoins en légumes pour une famille de 4 personnes durant la belle saison.
© Bertrand Dumont – Toute reproduction de cette image est totalement interdite.
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Bonjour,
quelle taille font les modules svp?
Merci
En fait, la dimension des modules est definie par le type de plants et le nombre de plants que vous cultivez.